Au diable les censeurs !

Si tu es biberonnés aux histoires de castes, d'ethnies, « o ko torodo »,  « o ko ceddo », « o ko cherif », « o ko macudo », « o ko diawando », « ki guer la », « ki guewel la »,  « o ko bi kaariyel (ki domu diw la) », « ki domou sokhna la », « ki domu Serigne la » ... il est tout à fait légitime que l'idée de « nation », l'idée de « république » te paraisse abstraite....

Il est absolument normal que tu ne saisisses point la portée d'un combat contre le viol de la constitution de notre pays.

Tu trouveras même que les gens exagèrent, ils sont dans l'excès, dans l'outrance parce que la grandeur des termes « nation », « état », « république », t'es peu familière.

D'ailleurs, ces notions, à peine tu sauras les distinguer, à peine tu sauras les mesurer, les classer ou mieux les définir dans ta langue que tu défends si hardiment...

Devant cet état de fait, ton désir de "normalité" appelle ta conscience à des postures de censeur de la pensée des autres lorsqu'elle déborde dans le champ de ton "inconnu" à toi...

Sauf que ton inconnu à toi n'est qu'une construction sociale facile à raser si jamais tu faisais l'effort d'écouter les autres, de lire, de voyager, de sortir de ta zone de confort.

Cependant, à peine tu voudras nourrir ta curiosité, à peine le censeur abstrait par excellence, la société viendra taper son maillet sur ta tête pour te remettre en rang. Que rien ne déborde, que rien ne change, que tous s'alignent...

Une société patriarcale extrêmement insidieuse prompte à l'intimidation psychologique qui avant s'arrêtait aux concessions familiales, mais aujourd'hui s'étend sur les réseaux sociaux...

À peine une publication est lancée, à peine tu reçois un message pour te suggérer de retirer tel ou tel passage, à peine c'est capturé pour faire l'objet de débats dans un autre canal hors du contexte de l'auteur... à peine on te rappelle que tu pourrais avoir besoin de tel ou tel poste demain et que donc il faut tempérer, baisser le froc, comme si la vie elle-même est un jeu d'échecs dépourvu de toute spontanéité, de tout hasard, de toute folie...

Tout ce qu'on attend de toi c'est de faire comme les autres, parler des mêmes sujets, mettre une petite photo de soi ou de sa femme, partager une petite blague et aller dormir....

C'est léger, ainsi dit...mais c'est ce même mécanisme censeur qui condamne la jeune demoiselle violée par le proche parent de la fermer pour l'éternité au nom des liens sacrés de la famille...

C'est ce même mécanisme qui condamne l'entrepreneur escroqué à s'en remettre à Dieu alors qu'il vit avec son malfaiteur à deux pâtés de maisons...

C'est ce même mécanisme censeur qui isole les femmes qui tardent à se marier et leur fout une pression exagérée.

C'est également le même mécanisme qui oblige les femmes mariées à enfanter au plus vite, puis vite le 2e, puis vite le 5e.

C'est toujours le même mécanisme qui maintient pour l'éternité dans la pauvreté  d'esprit et dans le manque d'initiatives une grande partie de la communauté...

Et encore c'est toujours le même mécanisme qui limite, avant l'État, les droits et libertés...

Rien ne peut éclore dans la censure... La contrainte... C'est dans la liberté totale que les idées fécondes qui ont bâti et révolutionné le monde sont nées...

Au diable les censeurs... Vive la liberté. Vive la liberté totale…sans un "mais" ni un "cependant", la liberté tout court... Totale...

Je n'éveille ni ne conscientise, j'ai la vicieuse ambition de te choquer...

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