Retour d'expérience : Enseigner le Génie Génétique à l'Université Numérique Cheikh Hamidou Kane
Au cours des trois derniers mois, grâce au réseau de l’association Doct’Sen, j'ai eu l'opportunité de dispenser 36 heures de cours en Génie Génétique aux étudiants de Licence en Génétique Moléculaire et Bio-informatique du Département Sciences, Technologies et Numérique de l'Université Numérique Cheikh Hamidou Kane.
L'objectif du cours était de répondre à des questions cruciales : comment réparer, remplacer, ajouter ou supprimer des gènes dans un génome donné ? Quels sont les bénéfices et le potentiel de ces manipulations dans les domaines de la médecine, de l'agriculture et de l'industrie ? Les étudiants ont ainsi acquis des notions clés permettant une compréhension approfondie des technologies de manipulation du matériel génétique, telles que le clonage, l'édition génique par CRISPR, la transgénèse, les techniques de séquençage de nouvelle génération et la biologie synthétique.
Ensemble, nous avons appris à concevoir et comprendre des expériences de génie génétique, à analyser des données génétiques, et à évaluer les implications (bio)éthiques de ces technologies. Mon objectif intimeétait également de libérer du temps pour les enseignants locaux afin qu'ils puissent se consacrer davantage à la formation pratique et à la recherche.
Défis rencontrés et observations
Tout au long de cette expérience, j'ai pu observer les étudiants individuellement et collectivement, noter leur intérêt pour le cours et mieux comprendre leurs préoccupations. Un des défis majeurs a été les interruptions fréquentes de connexion internet, souvent liées à une infrastructure réseau inadéquate. Plus de 50% des étudiants ont suivi les cours via leurs téléphones portables, faute d'ordinateurs ou de connexion internet fiable, ce qui a rendu l'apprentissage moins confortable, notamment pour des présentations interactives et illustrées. Heureusement, un communiqué du MESRI datant du 10 octobre a indiqué que la SONATEL fournirait un forfait internet de 7 Go aux étudiants de l'Université numerique, augmenté à 15 Go dès le 1er novembre, ce qui, je l’espère, devrait améliorer la situation.
Conscient des difficultés liées à l’accès physique à Dakar, j'ai tenu à ce que les examens se déroulent à distance, afin d'être en adéquation avec le caractère virtuel de l'université. Nos deux contrôles continus ainsi que l'examen final ont été organisés à domicile, évitant ainsi aux étudiants, parfois résidant dans des régions éloignées, d'avoir à se déplacer vers la capitale. Cette mesure a non seulement facilité leur participation, mais aussi respecté les principes de flexibilité propres à l'enseignement numérique.
Par ailleurs,
Par ailleurs, au delà d'une majorité d’étudiants ultra-motivés je n'ai pas manqué de constater que certains étudiants étaient présents par défaut, sans réelle orientation ou projet clair, tandis que d'autres exprimaient une forte curiosité pour des études à l'étranger, notamment au Canada. En discutant avec eux, j'ai pu observer que des étudiants se retrouvent en licence par manque d'alternatives pratiques ou faute de mieux. Cela m'a conforté dans l'idée, entre autres, que le système des bourses mérite une réforme. En effet, en novembre 2023 j'avais proposé de réorienter les financements (de la bourse universelle) pour privilégier les formations professionnelles et mieux aligner l'offre éducative sur les besoins du marché du travail, en évitant que des étudiants ne se retrouvent dans des filières académiques par défaut. En restructurant les bourses, l’objectif serait de mieux soutenir les étudiants en Master et en Doctorat, qui sont à des étapes où la production de savoirs, fonction première d’une Université, est cruciale (Lire l’article ici)
Ces observations sont corroborées par les résultats de notre sondage adressé à la jeunesse sénégalaise en début d’année (voir les résultats ici : Lien vers le sondage), qui montraient qu'une grande majorité (plus de 85%) des jeunes sénégalais envisage l’immigration comme une solution à leur avenir. Il semble donc nécessaire de repenser nos politiques éducatives pour mieux préparer la jeunesse à s’insérer dans le tissu économique local et limiter l’exode de compétences.
Analyse des résultats du sondage sur le cours
Afin d'évaluer la qualité de mon enseignement et d'identifier des pistes d'amélioration, j'ai mené un sondage anonyme auprès des étudiants. Avec un taux de réponse de 100%, les résultats fournissent une vision représentative de la réception du cours. Environ 85% des participants ont jugé le cours "Intéressant" ou "Très intéressant", reflétant un haut niveau d'engagement. De plus, 100% des répondants seraient prêts à recommander ce cours à leurs pairs.
Concernant la structure et le contenu du cours, 85% des étudiants les ont évalués comme "Bien" ou "Très bien". Cependant, le rythme du cours a suscité des avis partagés : bien que 60% des participants l'aient trouvé "Approprié", 40% l'ont jugé "un peu rapide" ou "trop rapide" (voir les résultats du sondage en format PDF à la fin du texte)
Perspectives d'amélioration
Les retours des étudiants ont mis en lumière plusieurs axes d'amélioration nécessaire sur le rythme et les supports pédagogiques. En réponse aux suggestions formulées, les prochaines itérations du cours intégreront davantage de cas pratiques (concomitamment aux travaux pratiques) et approfondiront certains sujets complexes. L’objectif est de renforcer l'apprentissage par l’expérience et d’offrir aux étudiants un cadre encore plus adapté à leurs attentes.
Je tiens à remercier sincèrement les étudiants pour leur engagement et leur participation active. Ce retour d’expérience s’inscrit dans ma démarche d’amélioration continue, visant à offrir un enseignement de qualité et en adéquation avec les besoins évolutifs des étudiants. Il est essentiel de rester à l'écoute de leurs retours pour leur proposer un apprentissage à la fois riche et stimulant.
Remerciements appuyés à Dr Khadidiatou Sall sans qui, cette collaboration n'aurait pas eu lieu.
Idriss Maham
Resultats sondages en format PDF